Ficool

Chapter 12 - brisées les limites | partie 2

Je suis partie, et à travers le rétroviseur j'ai vu son étonnement. Falone, ma Falone. Je me rappelle lorsque nous étions petits et que monsieur Roger organisait un barbecue. On allait se cacher dans la pièce qui aujourd'hui est devenue l'ancien bureau de mon père, pour sa passion de l'écriture. Falone était à ce moment-là, la deuxième femme que j'aimais le plus au monde. La première était et est toujours ma mère.

Mon père, ma mère et Mika. Oui, j'ai brisé les limites. Avant j'étais juste un scientifique de 12 ans qui aimait mutiler des animaux, du moins c'est ça que je me voyais. Mais aujourd'hui je suis la fin de tout, y compris moi-même.

Murielle, la femme du voisin Roger, avait entendu du bruit dehors. Elle est sortie et de loin avait aperçu Falone. Elle lui a demandé si elle voulait venir prendre quelque chose à grignoter. Et Falone, comme tout le monde de la ville, ne pouvait pas refuser. Pas seulement parce que Murielle était aimée mais surtout parce qu'elle était la meilleure cuisinière de la ville et avait plusieurs fois remporté des prix dans des concours à l'international. Falone suivit Murielle chez elle. Lorsque Falone, qui marchait derrière elle, rabattit la porte, Murielle lui demanda de fermer à clé.

— « Vous fermez les portes alors qu'il n'est pas si tôt ? » demanda Falone avec un ton respectueux.

Murielle lui répondit avec une légèreté rassurante :

— « C'est Roger, il n'aime pas quand la porte est ouverte… »

Falone acquiesça :

— « Ah d'accord je comprends. »

Son regard s'est posé sur une photo de classe encadrée. Murielle, ayant remarqué que Falone semblait être intriguée par la photo sur le mur, dit :

— « Il est beau hein ?! » avec un sourire léger et calme.

Falone sourit, mais un sourire très court. Alors Murielle lui demanda de prendre place. Et Murielle partit dans la cuisine.

Soudain, dans un couloir, une silhouette apparut, un homme. Il marchait en direction de Falone ou bien du salon. Falone, elle, ne se doutait de rien. Elle avait sorti son téléphone pour attendre que Murielle arrive avec des gâteaux. Mais l'homme avança en traînant ses pas. Plongée dans son téléphone, elle n'avait pas entendu celui qui s'approchait. Elle lisait des messages sur une application de discussion. Elle parcourait les discussions ; dans ses contacts qui lui avaient écrit, il y avait un message de la fondation La tendresse du cœur, un message d'un certain Nicolas Tissier, mais aussi un message de Maya.

Soudain, la tension se mit à monter, une main froide se posa sur son épaule. Falone sursauta, et lorsqu'elle se retourna, c'était monsieur Roger, qui lui dit :

— « Qui es-tu ? »

Il l'avait saisie au niveau du haut avec violence. Le regard rempli de rage et de questionnement. Il répéta :

— « Qui es-tu ?! » cette fois-ci avec un ton plus agressif.

Falone était prise de court, elle n'arrivait pas à parler. Aussitôt Murielle arriva,

— « Roger, c'est Falone », dit Murielle avec un plateau dans les mains.

— « Falone ! C'est toi ? » dit monsieur Roger en retirant sa main de l'épaule de Falone.

— « Oui papi Roger, c'est moi Falone… » dit-elle encore sous le choc.

Roger répliqua en disant :

— « Tu as beaucoup grandi. »

Au même moment qu'il a dit cette phrase, il a tourné la tête en direction de la photo de classe encadrée qui est sur le mur. Murielle est venue près de lui.

— « Ça va ? » a-t-elle demandé.

Elle demanda à Roger d'aller prendre ses médicaments.

Falone lui a répondu :

— « Oui ça va… C'est rien. »

— « Tu es sûre ? Si tu veux partir je comprendrais… » dit Murielle.

Falone répondit d'un geste de la tête. Un oui universel.

— « Mais je veux rester, monsieur Roger est comme un grand-père pour moi. Il organisait des fêtes de voisin presque tous les jours et moi, même si j'habitais loin, il faisait en sorte de me faire sentir comme chez moi », dit Falone.

Murielle sourit et dit :

— « Merci… Merci de ne pas avoir oublié à quel point Roger est un homme formidable… J'ai l'impression qu'à part toi, personne ne se souvient des bonnes actions qu'il a faites. »

---

Pendant ce temps, dans une autre ville.

De leur côté, Evan et Lucy essayaient de se parler. Mais cette fois plus calmement. Après avoir rabattu la porte de la chambre, elle était seule, dans la pièce. Evan était devant la porte de leur chambre, hésitant à frapper. Il pensait peut-être que ce n'était pas le bon moment…

Mais Lucy, avec son ton qui semble parfois être moqueur alors que non, dit :

— « Qu'est-ce que tu fais derrière la porte comme ça, tu as maintenant peur de rentrer ici ? »

De l'autre côté de la porte, Evan sourit, un sourire gêné.

— « Je ne voulais pas te déranger… » dit-il avec une mine triste.

Il ouvrit la porte et entra dans la chambre. L'atmosphère était électrique, lourde et personne ne parlait, mais on pouvait ressentir que les mots n'attendaient que d'être libérés. Des regards s'échangeaient. Lucy se mit à toucher ses cheveux car le silence était lourd. Et même s'ils étaient habitués à rester dans un silence sans être dérangés ou gênés, cette fois c'était différent. Evan s'était assis. Il avait la tête baissée et se sentait probablement coupable de vouloir déjà qu'ils aient un enfant alors qu'ils n'avaient pas encore fait leur deuil.

Pour Lucy, c'était aussi un silence permettant de se remettre en question. Elle savait qu'Evan avait mal et qu'il voulait juste pouvoir oublier cette étape, pour construire un nouveau chemin, une autre vie… Et de ce fait, Lucy se sentait mal de le priver de ça.

Mais personne ne parlait dans la pièce. C'était comme ça que Lucy et Evan géraient toujours leurs problèmes. Et ça depuis qu'ils avaient entamé leur histoire.

Lucy se décida, elle dit :

— « Je sais que tu veux être là pour moi, mais tu ne vois souvent pas que parfois j'ai besoin que tu ne fasses rien pour moi. Juste que tu ne dises rien, et que ta présence me réconforte bien plus que tes actes. »

Lucy posa ses yeux sur Evan. Elle savait que ce silence voulait dire tu as tort. Alors elle se remit à regarder ses pieds qui ne servaient plus à rien.

D'un coup, Evan se mit à vouloir parler. Lucy ressentit qu'il voulait presque exploser mais qu'il se retenait, par amour et respect pour elle.

— « Je… Je ne dis pas que tu n'as pas raison d'avoir mal. Tu as beaucoup souffert, des souffrances que même moi, malgré le fait que tu m'en aies parlé, j'ai du mal à imaginer. »

Evan parlait sans regarder Lucy, il faisait rouler sa bague de mariage sur son doigt. Evan continua :

— « Le problème, c'est que tu fais comme si c'était ton seul fardeau. En le faisant, tu donnes le pouvoir à ce fou de continuer à détruire nos vies même sans qu'il soit là… »

Remarquant que la tension commençait à monter, Lucy dit :

— « Evan… »

Mais elle fut arrêtée net par Evan :

— « Non… Lucy laisse-moi terminer. Tu me dis que je te couve trop, que je ne te lâche pas. Mais si je ne le fais pas, alors qui le fera ? »

Des larmes silencieuses coulèrent des yeux de Lucy, qui regardait Evan parler avec douleur et tendresse.

— « Mais je t'aime ! » cria Evan, les larmes aux yeux.

En entendant cela, Lucy détourna lentement le regard qu'elle avait posé sur Evan et le redirigea de l'autre côté. Elle versait des larmes silencieuses qu'elle essuyait rapidement. La chambre se transforma en tombeau. Pendant une minute ce fut le jeu du silence. Aucun regard, aucun mot. Plus rien.

Lucy se mit à chanter, enfin disons qu'elle murmura des paroles de chansons, leur chanson de mariage et qui était aussi la chanson de leur première fois.

Elle murmura :

— « Tu m'as séduit à petite dose… » mais ne continua pas.

En entendant cela, Evan leva les yeux en direction de Lucy et leurs regards se croisèrent. Un regard complice et plein de tristesse mêlée de compréhension. Cette chanson leur rappelait leur amour. Evan était ému, étonné : cette chanson était ancrée en eux.

— « C'est la chanson de notre première fois… » dit-il.

Lucy :

— « Oui, tu te rappelles ? On avait profité de la pluie ce soir-là en cachette. »

Même si cela ne faisait qu'un an qu'ils étaient mariés, ils s'étaient rencontrés très jeunes. Et depuis ils se connaissaient par cœur. Des deux, Lucy était toujours celle qui ne savait pas parler lorsqu'elle avait mal. Mais elle avait des gestes que seul Evan comprenait.

Et en vrai, leur amour était à eux et même moi je ne savais pas ce qui faisait vivre leur histoire depuis si longtemps.

Evan posa la main sur la cuisse de Lucy et dit :

— « Évidemment que je me rappelle, tu m'avais embrassé… »

Lucy enleva cette main et d'un ton moqueur répliqua :

— « Peut-être, mais c'était toi qui avais commencé. »

Evan se mit à répéter les paroles de la chanson à voix basse. La douleur n'était pas oubliée mais le silence avait laissé place à de l'amour et peut-être que c'était mieux ainsi.

Moi je roulais, j'avais beaucoup trop de questions en tête… Est-ce que je peux encore vivre une autre vie ou bien la frontière du non-retour était déjà là ? Je me demandais aussi dans quelle catégorie je suis.

Sans le savoir je suis venu à la maisonnette… Peut-être que j'avais envie de parler ? Et ma mère était toujours la femme que j'aimais le plus au monde…

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