Ficool

Chapter 11 - chapitre 6 : BRISÉES LES LIMITES

Falone était là, devant moi.

Autrefois, j'aurais été heureux de la voir… mais pas maintenant. Pas ici. Sa présence me coupait le souffle. Toujours aussi belle, comme à son habitude, mais cette fois son éclat ne faisait qu'appuyer mes ténèbres.

Son parfum flottait dans l'air, léger, sucré. Ses yeux brillaient d'une innocence que je n'avais plus. Moi, je la voyais déjà comme une proie. Une proie que je ne pouvais pas toucher. Et cette frustration me rendait encore plus nerveux. Mes doigts se serraient sur le manche de mon couteau, caché dans ma poche.

Falone me sourit, un sourire simple, naturel. Moi, je n'arrivais pas à sourire. Mon ventre se tordait, pas seulement de faim, mais de cette autre faim… celle que je ne pouvais pas avouer.

Falone :

— « Qu'est-ce que tu as ? »

GRÉY :

— « Non… j'ai juste faim, Falone. »

Elle pencha légèrement la tête, ses cheveux tombant sur son épaule. Elle avait ce geste qui me faisait toujours vaciller entre désir et colère.

Falone :

— « Je me disais bien aussi… Mais comment tu fais pour avoir ce corps de rêve si tu manges si rarement ? »

Ses mots résonnèrent comme une caresse. Mais à l'intérieur, je bouillonnais. Elle ne savait pas. Personne ne savait. Ma faim n'était pas de celles qu'on rassasie avec un repas.

Falone me regardait, sans se douter de la tempête en moi. Son sourire restait accroché à ses lèvres, innocent, fragile. Et moi, j'étais là, prisonnier de mon propre corps, partagé entre l'envie de la protéger… et celle de l'éteindre pour toujours.

Mon couteau brûlait dans ma poche, comme si l'acier voulait se libérer.

Je serrais le poing, mes ongles s'enfonçant dans ma paume.

Falone fit un pas vers moi.

Un seul pas, mais mon cœur se mit à battre plus fort, comme une alarme prête à exploser.

— « Tu trembles… Grey. Ça va ? » dit-elle, son regard soudain inquiet.

Je détournais les yeux. Ses pupilles étaient trop claires, trop pures. Si je continuais à la regarder, je n'étais pas sûr de ce que j'allais faire.

— « Je vais bien… » soufflai-je. Mais ma voix tremblait.

Elle fronça les sourcils, puis éclata d'un petit rire, léger, qui résonna dans le silence de la rue.

Ce rire… il me transperçait. C'était un rappel de ce que j'avais perdu, de ce que je n'étais plus.

À cet instant, j'ai senti mes limites se fissurer. Comme si une barrière invisible, qui me retenait jusque-là, venait de céder.

Je fis un pas vers elle.

Elle ne bougea pas, inconsciente.

Je pouvais sentir son souffle. Mon ombre se reflétait dans ses yeux.

Puis… un bruit derrière nous.

Un volet claqua au vent.

Un simple bruit, mais suffisant pour briser la tension.

Je reculai aussitôt, comme si je sortais d'un cauchemar.

— « Je dois y aller, Falone. » dis-je d'une voix sèche.

Elle resta figée, surprise, mais ne dit rien. Son sourire avait disparu, remplacé par une inquiétude muette.

Et moi, je partis, le couteau toujours dans ma poche, ma faim toujours intacte… mais mes limites, elles, venaient bel et bien de se briser.

Je sais que certains se demandent pourquoi je n'ai pas tué Falone, alors que je fais souffrir ma mère sans hésitation. Mais c'est différent.

Ma mère… elle sait tout de moi. Elle connaît mes ombres, mes mensonges, mes vérités. Elle sait qui je suis vraiment. Et parce qu'elle sait, elle représente un danger permanent. Chaque souffle qu'elle prend est une menace silencieuse.

Falone, elle… ne sait rien. Elle sourit, elle vit dans l'illusion que je lui tends. Pour l'instant, elle n'est pas un danger. Pas encore.

Mais si un jour ses yeux s'ouvrent, si un jour elle comprend… alors je n'aurai pas le choix.

Je devrai l'effacer. La tuer.

Et parfois, je me surprends à espérer que ce jour n'arrivera jamais.

Falone est restée figée devant ma maison, ses yeux suivant ma voiture qui s'éloignait. Ses lèvres tremblaient, mais aucun mot ne sortait.

Un frisson la traversa, comme si elle venait d'apercevoir un fantôme. Après un long silence, elle sortit son téléphone de la poche arrière de son jean. Ses doigts hésitèrent, puis elle composa un numéro. Celui de Maya.

Pendant ce temps, Maya profitait du calme de la grande villa familiale. Elle était venue passer un mois avec les Abogué.

Dans le salon, la famille se réunissait. Le luxe sautait aux yeux : fauteuils en cuir souple, meubles en chêne massif, chaque détail brillait d'une propreté presque irréelle. La villa respirait l'opulence, mais je savais que dans ces murs, les ombres étouffaient. C'était la maison où j'avais grandi, un paradis où mes démons n'avaient jamais trouvé leur place.

Maya, assise sur une chaise de la terrasse, sentit son téléphone vibrer. Elle décrocha.

— « Allô ? »

La voix de Falone résonna, basse, nerveuse :

— « Oui… tu avais raison. Il est plus mal que ce que je pensais. Que doit-on faire, maintenant ? »

Maya fronça les sourcils. La voix de Falone, étouffée par le souffle du vent, lui parvenait mal.

— « Parle plus fort, je n'entends rien… »

Falone, la main encore crispée sur son téléphone, regardait la route où la voiture de Grey avait disparu. Son cœur battait fort, comme si ses yeux venaient de croiser quelque chose qu'elle n'aurait pas dû voir.

Elle inspira profondément, puis laissa échapper d'une voix tremblante :

— « Maya… je crois que… j'ai vu un couteau. Ou quelque chose qui y ressemblait. Dans sa poche. »

Un silence suivit. Le bruit lointain des grillons semblait résonner encore plus fort.

De l'autre côté du fil, Maya se redressa sur sa chaise, le regard fixé sur le jardin illuminé de la villa.

— « Quoi ?! Tu as dit… un couteau ? »

Le visage de Falone se figea. Elle regretta aussitôt ses mots. Son instinct criait qu'elle ne devait pas aller plus loin. Pas maintenant.

Alors, dans un souffle, elle répondit :

— « Non… laisse tomber. J'ai dû me tromper. »

Maya resta silencieuse, mais son regard s'assombrit. Elle serra son téléphone un peu plus fort, comme si elle avait senti qu'une vérité venait de lui échapper.

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