Lyana, Thanatos & Guide
Le Guide avançait d’un pas lent et mesuré dans le couloir étroit,
son manteau noir flottant presque silencieusement derrière lui.
Il était venu pour la dernière fois,
ou du moins le croyait-il,
au chevet d’une fille qu’il connaissait depuis bien trop longtemps.
La chambre était étrangement silencieuse,
presque aseptisée,
comme si elle avait été coupée du temps lui-même.
Au centre, sur un lit trop vaste pour sa taille frêle,
Lyana reposait immobile,
enfermée dans un sommeil profond dont personne ne semblait pouvoir la tirer.
Autour d’elle, des symboles mystiques pulsaient doucement sous le sol,
leurs lueurs presque imperceptibles baignaient la pièce d’une lumière froide et bleutée.
À ses côtés, un prisme noir reposait,
aussi mystérieux que menaçant,
semblant enfermer une volonté invisible.
Le Guide s’arrêta,
ses yeux parcourant cette scène silencieuse
avec une intensité mêlée de respect et de crainte.
Il savait que cet instant dépassait de loin
toutes les épreuves et sélections qu’il avait eu à gérer.
Un frisson d’alerte parcourut son être,
un doute profond :
et si ce qu’il voyait n’était pas simplement un corps endormi,
mais bien plus ?
Un secret scellé.
Une force au-delà de sa compréhension.
Il fit un pas en avant,
conscient que ce moment allait bouleverser l’ordre des choses,
peut-être même sa propre existence.
Le silence régnait dans la pièce.
Trop propre.
Trop calme.
Le Guide n’était pas censé venir ici.
Ce n’était pas un lieu de sélection.
Mais un doute l’avait poussé à enfreindre sa propre rigueur.
Une trace.
Un frisson dans l’Axe.
Une anomalie dans les probabilités.
Elle dormait dans un lit trop vaste,
comme un cristal au centre d’un monde suspendu.
Son souffle était calme, régulier.
Autour d’elle, des glyphes invisibles pulsaient à peine sous le plancher.
Et à ses côtés…
un prisme noir.
Le Guide s’arrêta net.
Ce matériau…
Ce n’était pas un artefact.
C’était une volonté scellée.
Vivante.
Il s’approcha à pas lents, presque malgré lui.
Chaque pas pesait.
— Hm.
Mais qu’avons-nous là… ?
En l’état, elle est inutilisable.
Inapte.
L’épreuve ne peut l’accepter.
Il allait repartir.
Mais un murmure intérieur l’arrêta.
Ce prisme.
Cette forme.
Il l’avait déjà vue.
Une fois.
Une seule.
Et soudain, la sueur coula sur son front.
— Non…
C’est impossible.
Ce sceau…
Ce genre de scellement…
Une seule entité en est capable.
Kael ne peut pas.
À moins que…
Il tourna lentement la tête vers la dormeuse.
— Serait-ce elle… ?
Un tremblement, presque imperceptible.
Une tension dans l’air.
Il recula d’un pas, puis deux.
Son instinct cosmique hurlait.
Il venait peut-être d’offenser ce qui ne pardonne jamais.
— Non…
Ça ne peut pas être…
Elle…
Elle est l’Absolu ?
Non.
Pire.
Elle est l’Absolu de la Mort…
Il disparut instantanément,
se téléporta dans la pièce voisine.
Là, il la vit.
Thana.
Debout.
Dos tourné.
Immobile.
Quand elle se retourna,
ses yeux n’étaient plus noirs.
Mais d’un or incandescent.
Inhumain.
Un regard qui contenait la fin de toutes choses.
Pas un mot n’avait été prononcé.
Mais dans l’air,
la mort avait déjà été déclarée.
Le Guide se jeta à genoux.
— Pardon…
Je… Je ne savais pas…
Je vous en supplie…
Je n’avais aucune intention…
Je vous jure…
Thana ne dit rien.
Puis :
— Tu veux te faire pardonner ?
— Oui…
Oui, tout ce que vous voulez…
— Alors réponds.
Comment soigner la gamine dans la chambre ?
Il ne releva pas les yeux.
Il savait que c’était un test.
Une seule erreur,
et sa conscience serait effacée de tous les plans.
— Par…
Par un élixir.
De renforcement des noyaux et veines Magia intermédiaire.
Peu rare.
Le premier cercle marchand de l’étage dix peut en posséder.
Mais…
— Mais ?
— Même à mon rang…
Je ne peux pas aller le chercher.
C’est… interdit.
L’Axe Cosmique ne permet pas d’interférer à ce niveau.
Elle s’approcha.
Un seul pas.
Et la pièce sembla s’effondrer sur elle-même.
— Je ne t’ai pas demandé d’y aller.
Juste de répondre.
Tu l’as fait.
Tu es pardonné.
Il poussa un soupir…
Mais elle reprit :
— Deux choses encore.
Il se figea.
— Premièrement :
tout ce que tu sais sur moi, Kael, ou elle,
tu le gardes pour toi.
Absolument.
Deuxièmement :
tu veilles sur Kael.
Discrètement.
Si tu faillis à l’un de ces deux ordres…
Elle s’interrompit.
Mais le Guide sentit l’épée invisible s’enfoncer dans son âme.
— Non…
Non, je vous jure…
Je serai loyal.
Je… Je ne dirai rien.
Je le protégerai…
— Bien.
Elle tourna à nouveau le dos.
— Maintenant disparais.
Avant que je change d’avis.
Il disparut.
Elle ferma les yeux,
seule au milieu du silence,
Tandis que le Guide prononçait d’une voix grave :
— Tu ne le sais pas encore, Kael…
mais la Mort veille sur toi.
