Le vent soufflait à travers les arches du palais, emportant avec lui la cendre du feu royal.
Les dragons s’étaient dispersés, trop terrifiés pour oser parler.
Mais leurs regards restaient fixés sur le trône vide, comme si le souvenir du roi déchu refusait encore de s’effacer.
Ryo, seul, avançait dans la grande salle.
Ses pas résonnaient dans le silence, lents, mesurés.
Chaque écho semblait peser sur les murs, sur les âmes, sur le temps lui-même.
> « Ils tremblent encore, » souffla-t-il.
« Pas par loyauté… mais par peur. »
Un éclat doré traversa un instant ses yeux avant de s’éteindre.
Il s’arrêta, leva la main et observa la marque qui y brillait faiblement.
Le sceau du roi dragon battait encore, comme un cœur étranger au sien.
> « Tu m’as confié ton trône… mais pas ton peuple. »
Un murmure effleura alors son esprit — une voix familière, calme, presque douce.
Elle ne venait pas d’ailleurs. Elle était en lui.
> « Le peuple suit la flamme.
Tant que tu n’en porteras pas la chaleur, ils resteront dans l’ombre. »
Ryo ferma les yeux, son souffle se fit plus lent.
Ses pensées devinrent fluides, silencieuses.
> « Alors je forgerai une flamme qui ne vacille pas.
Pas une arme. Pas un roi.
Mais une présence qui veille. »
Le vent s’éleva, tourbillonnant autour de lui.
Les dalles se mirent à vibrer, comme si quelque chose, sous la pierre, s’éveillait d’un long sommeil.
Les torches s’inclinèrent sous la pression d’une force invisible.
Et du silence naquit une lueur.
Une faible lumière blanche, pure, presque fragile, apparut au centre de la salle.
Elle flottait, hésitante, comme un souffle cherchant à devenir vie.
Ryo tendit la main, sans émotion.
Son regard, froid et calme, se posa sur cette lumière.
> « Vous serez mes gardiens.
Nés du silence.
Liés à la volonté seule.
Ni chair, ni feu, ni serment.
Vous existerez… pour veiller. »
Alors la lumière se divisa.
Une, puis deux, puis dix formes se dessinèrent lentement, comme sculptées dans l’air lui-même.
Leur apparence demeurait floue — silhouettes d’ombre et de clarté mêlées.
Elles s’agenouillèrent toutes d’un même mouvement, sans souffle, sans parole.
Le palais sembla retenir son souffle.
Même les flammes cessèrent de danser.
Ryo les observa un long moment avant de tourner les talons.
> « Tant que je règne, nul ne brisera le silence d’Ashen. »
Ses pas s’éloignèrent, se perdant dans la nuit.
Derrière lui, les Gardiens du Silence ouvrirent lentement les yeux.
Et dans ce regard sans lumière…
le monde sentit qu’un nouvel ordre venait de naître.